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  • Anti-constitutionalité, illégalité ou a-légalité ?

    Anti-constitutionalité, illégalité ou a-légalité ?

     
     
     

    La France, qui se réclame de la démocratie et ne se prive jamais de donner des leçons par la voix de ses dirigeants, est surtout et avant tout un état de droit. -en théorie-

     

    Or, le 24 février 2022, début de la guerre entre l’Ukraine et la Russie, l’Ukraine n’est pas un pays de l’Union Européenne, ni un membre de l’OTAN et n’a aucun accord de défense avec la France. Celle-là n’a pas non plus d’intérêts vitaux en Ukraine. Il eut été pertinent de se poser la question de savoir si la France devait intervenir. Mais le choix politique fait par le Président de la République d’aider l’Ukraine n’est pas le sujet de ce papier.

     

    En revanche, la question de la légalité de notre engagement se pose.

     

    Tout d’abord, ce choix politique n’a pas été suivi d’un choix législatif et judiciaire.

     

    Par l’article 411-3 du code pénal révisé par l’Ordonnance du 19-11-2000, nous nous interdisons de livrer des moyens militaires au détriment de la défense nationale.

     

    Par la Résolution du 30 novembre 2022 (303 voix sur 399 votants), l’Assemblée Nationale réaffirma son soutien à l’Ukraine par le double biais de l’U.E. (article 12) et celui du gouvernement (article 20).

     

    Si en toute rigueur ces deux dispositions ne sont pas contradictoires, dans les faits, le prélèvement de matériels militaires dans certaines unités constitue une infraction qui révèle la caution sinon la complicité des votants, le législateur laissant enfreindre la loi qu’il a lui-même rédigée.

     

    De fait il y a bien illégalité gravissime à enfreindre la loi délibérément. Surtout pour un législateur !

     
     
     

    Puis, l’accord de sécurité signé à Paris le 16 février dernier entre, non pas la France et l’Ukraine, mais entre les présidents respectifs, témoigne d’un degré supplémentaire dans l’illégalité.

     

    Notons les réactions immédiates de, d’une part, Messieurs Nicolas DUPONT-AIGNAN et Alain HUPERT qui s’insurgeaient qu’eux seuls sur 952 parlementaires aient réagi face à cette initiative personnelle sans consultation de la représentation nationale, ainsi que la déclaration publique conjointe de Messieurs Hubert VEDRINE et Jean-Pierre CHEVENEMENT qui réclamaient un débat sur le fond en en saisissant le Parlement ; soient deux signaux clairs que cette initiative outrepassait sinon violait l’état de Droit. De nos droits.

     

    Cet accord quasi personnel entre deux hommes n’a aucune valeur juridique. Il n’a fait l’objet d’aucune consultation comme l’article 53 de la constitution l’eût exigé, ni d’une loi assortie d’un décret d’application et bien sûr… d’aucune publication dans le Journal Officiel.

     

    En clair, cet accord n’est pas seulement illégal mais purement « a-légal ». Un vide juridique.

     

    Sans écarter une basse manœuvre de notre Président pour tromper son visiteur, fort improbable d’ailleurs, ce texte a quand même des conséquences potentielles gravissimes que nous allons voir.

     
     
     

    Ensuite, ayant proclamé « qu’il ne fallait pas laisser gagner la Russie », le Président MACRON a fait état d’une « européisation de notre dissuasion nucléaire » (déclaration VEDRINE-CHEVENEMENT) lors de son voyage en Suède, plaçant ainsi la France, déjà considérée comme cobelligérante par la Russie, en position de cible numéro Un dans le cas d’un conflit direct entre l’OTAN et la Russie.

     

    Enfin, le 26 février dernier, le chef de l’état, peut-être par le réflexe de ceux qui pour tenter de retrouver une popularité qui leur échappe désignent un ennemi extérieur, a franchi un degré de plus vers la guerre en déclarant possible l’envoi de troupes occidentales face à la Russie.

     

    Alors, veut-il la guerre ? Est-ce seulement une gesticulation imprudente mais dangereuse ?

     
     
     

    Dans son article L 4122-1 du code de la Défense, il est stipulé qu’un militaire n’est pas obligé et a même le devoir de ne pas obéir à un ordre manifestement illégal, ce qui est avéré ici, de par le vide juridique montré plus haut.

     

    L’accord du 16 février précise expressément prendre effet à compter de la date de la signature (!). Le Président a-t-il, peut-il et va-t-il donner des ordres pour sa concrétisation ?

     

    Quoi qu’il en soit et de notre point de vue ce texte apporte et doit poser un réel problème de conscience aux militaires. Si les échelons subalternes, le nez dans le guidon, comme souvent ne voient pas forcément la gravité autant que le caractère ubuesque de la situation, les hauts échelons de la hiérarchie ne peuvent l’ignorer et la ligne rouge à ne pas franchir ne peut que les inciter à appeler le chef des armées à la raison.

     

    Toujours très légalistes, ils ne peuvent que constater l’état de droit ici bafoué. Ils le doivent !

     

    Pourquoi ?

     

    Un jour viendra où certains de nos gouvernants et hauts responsables auront à rendre des comptes au peuple qui selon l’article 3 de notre Constitution détient seul la souveraineté nationale confiée le temps limité de leur mandat à ses représentants, non pour être trahi mais pour avoir une gouvernance conforme à ses vœux et surtout intérêts.

     

    Posons-nous tous, d’urgence, la double question solennelle suivante :

     
     
     

    Qui veut mourir en et/ou pour l’Ukraine ?  

     

    Qui veut mourir à cause du délire d’un tyran ?

     
     
     

    Le 27 février 2024.

     

    Général (2S) André COUSTOU.

     

    Président d'honneur de Place d'armes.